Le livre dans la communication politique en France

À l’approche de l’élection présidentielle la fibre littéraire des candidats se réveille, chacun publie un livre où il dévoile sa vision de la France et le rapport qu’il entretient avec elle, pourquoi elle va mal et comment il entend lui redonner sa splendeur d’antan.

 

Cet exercice du livre politique est une spécificité française, sans doute la conséquence que notre classe politique avant d’être dominée par les énarques, les polytechniciens, les professions libérales et les fonctionnaires, fût le lieu d’affrontements des lettrés et des littéraires.

 

Mitterrand, De Gaulle, Jaurès ou Hugo furent les dignes représentants de ces politiques lettrés à la production littéraire foisonnante.

 

Aussi l’imaginaire collectif est-il imprégné de cette croyance du Chef d’Etat gardien d’un certain classicisme à la française qui doit savoir prendre la plume pour détailler ses idées. Pour sa réélection de 1988 François Mitterrand n’a-t-il pas écrit une “Lettre à tous les Français” ?

 

Néanmoins une évolution très significative à eu lieu au cours des dernières décennies dans le fond comme dans la forme de ces ouvrages. Au fil du temps le sujet principal de ces livres n’a plus été la France, la République, la société ou même la politique au sens de l’ensemble des affaires qui touchent à la vie de la cité.

 

Un glissement a eu lieu vers l’égocentrisme, le livre politique aujourd’hui parle de son auteur par son auteur dans un exercice autocentré. La disparition progressive de la frontière entre la vie privée et la vie publique conduit les hommes politiques à projeter leurs expériences personnelles comme autant de preuves de leurs déterminations futures.

 

Le projet n’est plus prioritaire, la réflexion sur la vision du monde, l’avenir de notre société n’importent plus. Le politique ne nous éclaire plus sur le chemin où il veut nous conduire, il nous demande de lui faire confiance et de le suivre.

 

Les livres politiques étaient des essais, ils sont devenus des romans d’apprentissage où le “je” qui n’existait pas est devenu omniprésent et surtout omnipotent.

 

On a beaucoup parlé de la “peopolisation” de la vie politique ces dernières années, il est intéressant de noter que leurs photos se trouvent désormais en gros sur la première de couverture, juste en dessous de leurs noms.

 

Mais dans la profusion certains tirent leurs épingles du jeu et continue de perpétuer cette tradition du livre politique naviguant entre pamphlet et essai. Citons Jean-Luc Mélenchon ou François Bayrou qui résistent encore à la tentation de ne parler que de leurs augustes personnes. Et au fond ce sont eux que l’histoire retiendra peut-être, quelque soit leur succès en librairie.

 

Et si tout le monde se souvient du “Coup d’Etat permanent” de François Mitterrand, pourtant peu de gens l’ont eu dans leur bibliothèque car avec 60 000 exemplaires vendus entre 1964 et 1993, il est difficile de parler d’un succès commercial. Malgré cela le destin fût au rendez-vous.

 

 

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